On ne s’imagine pas, en traversant le village de Drauffelt, toujours baigné dans cette brume de fond de vallée, de l’ardeur cachée entre les murs de cette belle bâtisse ardennaise flanquée d’un « YR ».
En parfait chef de troupes, Yves Radelet est à tous les postes. Il est vrai que depuis quelques années, le cuisinier de renommée et sa joviale épouse Jennifer sont sur tous les fronts de la gastronomie. Outre le restaurant, la Ferme de Drauffelt semble suivre la même destinée et un beau succès. De restaurateurs, ils passent désormais au stade de producteurs-restaurateurs. Un seul objectif relie les différents projets : maîtriser la chaine du goût et sublimer les produits du terroir pour les palais de leur clientèle, toujours plus nombreuse, plus lointaine aussi.
Car oui, après avoir quitté la capitale, tombés amoureux de ce recoin de l’Eislek, le pari était osé. Mais aujourd’hui, chaque soir de week-end, une véritable migration s’opère de Luxembourg ville à Drauffelt. Un balai de fins gourmets venus à la découverte du meilleur restaurant du nord du pays (Explorator 2017, dans lequel le Manoir Kasselslay, à quelques minutes, fût également nommé). Comment peut-on expliquer le succès de ce couple chaleureux ? Peut-être par l’expérience même du chef belge qui, avant de s’implanter au beau milieu de nulle part (il faut l’avouer), avait fait ses armes chez les meilleurs à Bruxelles, Durbuy, Saint-Vith et dans la capitale, jusqu’à ouvrir son premier restaurant à son nom rue du Curé en 2005 puis à Belair en 2008. Pionnier dans la cuisine créative et moléculaire, à une époque ou la gastronomie luxembourgeoise paressait légèrement, le chef avait tapé dans l’œil de tous, remportant le titre de « Grand de demain » en 2006 puis « Chef de l’année » en 2008 par Gault&Millau.
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Plus que sa réputation, est-ce que le succès d’Yves Radelet ne proviendrait simplement pas de sa passion naturelle pour l’art de vivre, la bonne chère et sa recherche du goût juste ? Sa cuisine est rassurante et exaltante, ses assiettes généreuses et complexes et ses produits de qualité, mettant en exergue tout ce que le terroir et ses mains font de mieux. Les clients ne s’y trompent pas. On y vient et on y retourne pour l’expérience culinaire. Du temps (ancien ?) ou les restaurants étaient accessibles, Yves Radelet et son équipe nous offraient un spectacle en continu au restaurant, cuisinant parmi les clients. Recherche de transparence ou envie de rester au plus proche de ses invités ? Définitivement les deux. Pour avoir eu la chance d’observer le travail en atelier, l’entièreté de ce qui est proposé est préparé entre les quatre murs du restaurant. Les fonds sont toujours fumants sur un coin de piano, prêt à venir se mélanger à d’autres ingrédients et former des sauces d’exception. Du pain aux saucissons, tous produits finis le sont à Drauffelt.
Au détour d’un café, nous découvrons la nouvelle salle de restaurant, rénovée et agrandie pendant les mois de fermeture. Si les propriétaires veulent garder la surprise, nous pouvons vous dire que nous n’avons qu’une seule hâte : nous asseoir à leur table !
En parallèle du restaurant, le couple a créé sa marque « Ferme de Drauffelt », qui propose une large gamme de fromages, yaourts, charcuteries et pâtés ainsi que des pâtes fraîches et d’autres produits. Les produits de base sont issus de fermes locales et transformés et affinés ici à Drauffelt. C’est en descendant un petit escalier en colimaçon que nous tombons dans le paradis des nombreux amateurs de fromages.
Le lait de vache et de chèvre de l’Eislek est magnifiquement sublimé par les fromagères présentes. Au fond, dans plusieurs étalages, des dizaines de Caprices de Drauffelt s’affinent doucement. On craque pour la tourelle de chèvre et la brique rouge de Drauffelt, qui pour nous s’apparente à un fromage de Brie. Dans notre sac de retour, on glissera également une dizaine de yaourts onctueux aux fruits. Une large gamme de la Ferme de Drauffelt est disponible en vente dans les grandes surfaces du Grand-Duché du Luxembourg (Match, Cactus,...). Si vous y trouverez tout le nécessaire pour l’apéro, un pique-nique ou encore un plateau de fromages, le plat principal peut s’emporter également ! Les bocaux de Drauffelt ont fait leur apparition, proposant des plats mijotés dans de beaux Weck à réchauffer au bain-marie. Bœuf bourguignon, blanquette de veau ou porc façon liégeoise (un incontournable pour un Hutois et une Verviétoise), ces bocaux pour 2 personnes permettent de ramener chez soi tout le savoir-faire du cuisinier. Ce dernier met de plus un point d’honneur à garnir copieusement les récipients. Vous en aurez pour votre appétit !
Autre surprise lors de notre rencontre. Entre les commandes, la fromagerie, la cuisine et les travaux de rénovation, Yves Radelet s’est lancé dans un nouveau défi : le 100 % recyclable. La crise sanitaire ayant en effet amené le couple à proposer des menus à emporter, la conscience environnementale du chef l’a poussé à se lancer dans un projet un peu fou. Aujourd’hui, se sont deux étudiants en ingénierie qui occupe les tables du restaurant. Leurs objectifs ? Développer des packagings adéquats réduisant la quantité de plastique tout en utilisant de la matière première plastique recyclable totalement. Ces nouveaux récipients viennent donc en appui lorsque la matière cartonnée n’est pas utilisable pour contenir certains aliments. Les étudiants travaillent aussi sur différents moules permettant de créer des présentations d’assiettes presque sans limite. Impressionnant ! On ressent, comme à l’époque, cette urgence chez le chef d’aller de l’avant, d’avoir un regard neuf sur la gastronomie en se basant sur les technologies de son temps.
On se souvient de son travail sur la lyophilisation menée avec l’Agrobiotech de Gembloux qui lui avait permis à l’époque de créer sa propre technique moléculaire pour extraire le liquide par le froid de certains aliments pour mettre en exergue leur goût. Cette recherche constante avait également permis à Yves Radelet de libérer sa propre cuisine et d’être dans de la création pure, lui donnant les ailes nécessaires à ouvrir son propre établissement.
Un clin d’œil à Jennifer Murgia-Radelet (Hôtesse de l’Année 2019), qui vient, par sa bonne humeur communicative, apporter la cerise sur le gâteau.
Circuit-court, production « maison », indépendance,… le couple semble exceller dans tous leurs projets. Avec une clientèle toujours au rendez-vous pour suivre les producteurs-restaurateurs dans leurs projets les plus fous. Et si le secret de leur réussite était aussi, tout simplement, cette furieuse envie de plaire et de faire plaisir ? Si tel est le cas, ils ont réussi !
Adresse: 11, Duerefwee - 9746 Drauffelt Luxembourg
Ouverture :
Vendredi: 18h30 - 21h00
Samedi: 18h30 - 21h00
Dimanche: 12h00 - 14h00
Site web: yvesradelet.com